Nouvelle doctorante au laboratoire de science politique de Sciences Po Aix depuis la rentrée de septembre 2020, Anna Goubert a obtenu une bourse de la Région Sud-PACA, qui lui permet de financer sa thèse et d’assurer le poste de Chargée d’étude MED 2050 au Plan Bleu.
Anna Goubert, vous êtes doctorante au CHERPA de Sciences Po Aix depuis la rentrée de septembre 2020 et Chargée d'étude MED 2050 / Project Officer MED 2050 au Plan Bleu, pouvez-vous nous parler de vos recherches et des spécificités de votre statut de doctorante ?
Nouvelle doctorante au laboratoire de science politique de Sciences Po Aix depuis la rentrée de septembre 2020, j’ai obtenu une bourse de la Région Sud-PACA, la bourse “Emplois Jeunes Doctorants”, qui me permet d’être financée pour trois ans. En effet, tous les ans, la Région finance des thèses qui associent trois parties : un-e étudiant-e (futur-e jeune chercheur-se), un laboratoire de recherche (forcément situé sur le territoire régional) et un “partenaire socio-économique” (il peut s’agir d’une entreprise, une association…).
Pour ma part, je travaillais depuis mars 2019 au Plan Bleu, en tant que stagiaire (pour mon stage de fin d’études), puis en tant que chargée d’étude. Organisme international, ayant la forme d’une association loi 1901, le Plan Bleu est basé à Marseille. Il apporte un appui aux États méditerranéens, en publiant des études sur l’état de l’environnement et du développement en Méditerranée, et en portant un regard prospectif sur l’avenir. De mars 2019 à fin août 2020, j’ai participé à la mise en place d’une nouvelle étude prospective coordonnée par le Plan Bleu, “MED 2050”, visant à réunir un réseau d’acteurs méditerranéens (scientifiques, décideurs, et autres parties prenantes) afin de construire des scénarios contrastés pour l’avenir de la région Méditerranée à horizon 2050. A ce moment là, en tant que chargée d’étude, je réalisais des tâches de type entretiens avec des acteurs, préparation de réunions, rédactions de compte-rendus, de notes de synthèses ou de présentations powerpoints pour préparer des interventions.
Toutefois, au fur et à mesure des mois et de l’avancée du projet, j’ai réalisé que ce qui m'intéressait davantage, c’était la thématique de “la prospective” en soi. D’où venait cet outil de “planification” de l’avenir (bien qu’il ne se résume, bien sûr, pas uniquement à cela) ? Les “décideurs” s’en servent-ils réellement, lorsqu’ils construisent les politiques publiques, notamment en matière d’environnement ? Faut-il forcément être un “expert” de la prospective pour participer à cet exercice, ou est-ce envisageable et réalisable de l’ouvrir à la “société civile” ?
Ces questions germant dans mon esprit, j’ai réfléchi à la meilleure manière pour moi de parvenir à les traiter, tout en restant impliquée dans la mise en œuvre du projet avec le Plan Bleu. L’option de la thèse s’est alors dessinée, d’autant plus que j’ai découvert, après des recherches et des discussions avec plusieurs doctorants et enseignants-chercheurs, l’existence de cette bourse régionale, donnant la possibilité de réaliser une thèse en partenariat avec un “partenaire socio-économique”, ici le Plan Bleu.
Cette double casquette est donc rendue possible par le financement de votre thèse par la bourse de la région. Comment avez-vous découvert cette bourse et quelles sont les modalités d’obtention ?
Pour obtenir cette bourse, il faut postuler sur le site de la Région, en remplissant un dossier de financement, et envoyer un projet de recherche d’une dizaine de pages. Auparavant, il est toutefois nécessaire d’avoir trouvé un-e directeur-e de thèse, intéressé-e par le projet, et de s’être inscrit-e dans un laboratoire. Pour ma part, une fois mon projet de thèse plutôt mûri (je savais que je souhaitais travailler sur la prospective dans un contexte méditerranéen, et questionner son lien avec l’action publique), j’ai fait des recherches principalement sur internet et en passant par mes contacts personnels, pour trouver un-e enseignant-e chercheur-e pouvant être intéressé-e pour me diriger sur ce projet. Après avoir trouvé, je me suis inscrite au laboratoire de Sciences Po Aix, car les axes de recherche correspondaient à mon projet, et que ma directrice de thèse est attachée à ce laboratoire. Enfin, j’ai postulé et obtenu la bourse régionale, car mon projet était, je pense, bien construit avec le Plan Bleu, et répondait également aux “filières stratégiques” de la Région Sud. En effet, la Région finance en priorité les projets de recherche qui s’inscrivent dans un de ses axes d’actions prioritaires. Ici, le lien du Plan Bleu et du projet de prospective avec les autres États méditerranéens, ainsi que le focus sur les problématiques environnementales a répondu à ce critère.
Comment organisez-vous vos journées pour alterner entre les missions de votre poste et vos recherches dans le cadre de votre thèse ? Est-ce que la pandémie influence vos conditions de travail ? De quelle forme d’adaptabilité devez-vous faire preuve?
Depuis début septembre 2020, j’ai officiellement démarré la thèse. Bien sûr, le contexte de crise sanitaire a rendu cette rentrée un peu particulière (beaucoup de télétravail, peu de déplacements à l’IEP ou dans les bibliothèques universitaires). Globalement, je consacre les trois quarts de mon temps de travail à la recherche, et le reste du temps, j’ai toujours des missions de chargée d’étude au Plan Bleu. Lorsque je fais de la recherche, il s’agit surtout de lectures, indispensables à une première année de doctorat, ainsi que la formulation d’hypothèses, et l’analyse des observations de terrain. Lorsque je suis au Plan Bleu, j’appuie les autres salariés sur l’organisation de l’exercice de prospective : préparation, participation et compte-rendus de réunions, participation à la réflexion méthodologique sur le projet. Ce qui est intéressant, c’est que ces deux activités, d’un côté la recherche et de l’autre l’opérationnel, ne sont pas séparées l’une de l’autre, mais au contraire s’alimentent mutuellement. En effet, le Plan Bleu est mon terrain de thèse principal. Lorsque je travaille dans la structure en tant que chargée d’étude, j’ai aussi ma “casquette” de chercheuse, et toutes les activités auxquelles je participe sont pour moi des observations participantes. Bien sûr, cet avantage est accompagné de contraintes, puisqu’il est nécessaire de maintenir constamment un effort d’objectivation, dans la mesure où je deviens un des objets de ma propre recherche. Toutefois, je suis convaincue que ma position particulière de “chercheuse-embarquée” (Alam et al., 2012) m’offre réellement l’opportunité d’apporter un regard nouveau sur l’objet de recherche qui est le mien.
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